Rarement le mot « espoir » avait eu autant de poids dans la bouche des suiveurs du rap galsen. Phénomène technique et monstre de précocité, Ngaka Blindé est présenté comme une valeur sure de la musique Sénégalaise. Contrairement à la signification de son nom d’artiste Baba Ndiaye n’est pas un ignorant. Aujourd’hui, à 25 ans à peine, le natif de Guédiawaye s’attaque au marché international. Vous ne pourrez pas dire que vous n’étiez pas prévenus.
Il sonnait 2h48 ce samedi 16 avril 2016 quand la mère de Ngaaka Blindé, tout de blanc vêtue, a rejoint son fils sur scène du Grand théâtre autour de la pléthore de batteurs. Ce moment est empreint d’émotion. Ngaaka ne pouvait retenir ses larmes. Naturellement la dame, dans les bras de son fils, sanglote. Le rappeur n’aura plus la force de revenir sur scène. Visiblement, l’émotion a été trop forte pour lui. C’est ainsi qu’il cède la place aux « Baye Fall » qui ont assuré la dernière partie du concert. C’est le clou d’un spectacle qui a définitivement validé l’entrée de Ngaka Blindé dans la cour des grands.
L’album Def buzz, sorti la même année, a fini de mettre une image sur cet artiste qu’on disait prometteur. Ainsi ce premier opus vient mettre un terme à 7 années de traversée du désert. En effet, la carrière de Ngaka Blindé a commencé en 2009. Il a fallu deux ans qu’il qualifie de « stage » pour se convaincre « d’aller chercher sa place dans le game ».
En 2011, le jeune homme, dans l’optique de se faire connaître, avait participé à une compétition hip-hop discover où il a été disqualifié en demi-finale. Mais il ne se décourage pas. Baba Ndiaye s’était plus tard inscrit dans l’émission «Hip-hop feeling» de Fata sur la 2stv. Et dans la même année, il réalisa son premier single Leppfay. Le produit n’a pas fait un carton comme il le souhaitait. Alors en 2013, il participa au «Flow up», une compétition organisée par Africultururban.
Vainqueur de cette compétition, Ngaka Blindé empoche un million Cfa et fait la tournée des médias. « Rien ne sera plus comme avant » assurait-il. Le jeune homme qui vivait avec sa grand-mère à cette époque est tiraillé entre les études et le rap. «Le rap, je ne l’ai pas ramassé dans la rue, il est venu me trouver dans mon école. Quand on récitait en classe, quand mon tour arrivait, je faisais du rap. En ce moment, je ne mémorisais pas ce que les gars faisaient, car je n’écoutais pas le rap carrément. Un texte de Fou Malade fait partie des textes avec lesquels j’ai appris à écrire » explique-t-il son choix d’abandonner les études au profit d’une carrière dans la musique.
Ce choix n’a pas été facile. Son père n’étant pas d’accord ne s’est pas opposé à cette décision tout comme sa mère. « Mon seul soucis était mon maitre. J’ignorais comment m’y prendre pour lui annoncer la décision. Ma mère, elle, n’a pas de problème pour ça. Mon objectif est de faire en sorte que ceux qui n’ont jamais écouté ou n’aimaient pas le rap l’aiment à travers mes œuvres ». Le but étant déjà identifié, Ngaka sait qu’en se basant sur nos rythmes il sera plus facile d’y parvenir. Seulement, son écriture ne fait pas l’unanimité. Il n’est accessible qu’aux jeunes à cause des injures. Et cela, le rappeur l’assume.
« Le hip-hop, quoi qu’on puisse dire, ça reste toujours le hip-hop. Et puis, ça parle de tout et de rien. Je le dis souvent, il faut laisser le hip-hop avec sa casquette de jeunesse. Le rap c’est le rap, il y a du clash, ego trip, il y a tout ce que l’on entend dans la rue, dans le marché, dans les bureaux. Si vous écoutez Ngaka, il y a de ses sons où il y a des injures, mais il y a également autre chose. Pour tout ce qui est langage de rue, les adultes ne peuvent pas l’écouter. Mais dans d’autres textes, il y a des cris du cœur qui peuvent éveiller les consciences de certaines personnes. Si j‘ai des problèmes avec mes camarades rappeurs, je ferais tout ce qu’il faudra pour réparer mon tort. Mais si je veux parler avec le gouvernement, j’ai une autre de méthode de communication. A chaque fois que j’écris pour un public que j’ai ciblé, je pèse mes mots » a-t-il expliqué.
Actuellement en France pour la conception d’un double album, Ngaka fait partie des premiers artistes que le label Keyzit international a signé. Cette maison de production basée en France veut faire du rappeur de Guédiawaye une vedette de la scène internationale. Et n’hésite pas à y mettre les moyens. Seulement son séjour en prison a calmé les ardeurs de ses producteurs. En effet, pour Altération de signes monétaires Ngaka a fait une année à la prison de Reubeus. Il est finalement acquitté.