Les morts, les survivants, et ceux qui en portent encore les stigmates…La «crise» en Côte d’Ivoire, pour parler comme le photographe Gédéon Pooda, connu pour son travail sur les «malades mentaux» nés de la crise dans son pays, a laissé de nombreuses «séquelles». Et d’une certaine manière, disons que l’œuvre du photographe, qui a eu le privilège de représenter son pays à domicile, lors des 8e Jeux de la Francophonie, chercherait à combler un vide. Des malades mentaux dont «on ne parle pas», un peu comme s’ils n’existaient pas finalement, dans une société peut-être dans le déni…
Si Gédéon Pooda s’est laissé prendre à ce «projet», c’est avant tout par «devoir» dit-il : «Faire ces photos pour pouvoir en quelque sorte conscientiser la population, vers une prise en charge de ces malades mentaux».
A elle seule, la méthode de l’artiste, qui se dit «autodidacte» exprime ce refus : pas de «fous» transparents ou invisibles, pas de «fous» à la marge, puisqu’ils font partie de nous. La preuve, avec les encadrements du photographe, qui tient à ce que ceux-là soient aussi «naturels» que les «écorces d’arbre». Arguments à l’appui, la nudité sans artifices des malades mentaux en errance, qui imposait donc cette sorte de «retour à la Nature». Sinon, il y a tout simplement l’empathie d’un artiste, qui s’intéresse aussi à la «maltraitance des enfants» : «Je me dis que ce sont des êtres humains comme nous, et quand je les vois errer dans la rue, ou quand je les vois fouiller dans les poubelles, sans abri, ça m’interpelle. C’est comme si je me voyais moi-même à leur place, raison pour laquelle ma démarche est sur la réalité sociale, culturelle et ethnographique ».
Dixit un photographe qui se contente de n’être «que» l’artiste derrière la signature, histoire de dire que c’est aux autres «d’apprécier».